Le pergélisol est présent sous plus du tiers de la surface émergée du Canada. La majeure partie de cette surface connaîtra une perte persistante de glace souterraine tout au long du XXIe siècle et par la suite, qui donnera lieu à des changements irréversibles dans le paysage, à des défis majeurs en ce qui a trait à la conception et à l’entretien de l’infrastructure et à des menaces pour la santé des résidents du Nord.

PermafrostNet CRSNG réunit des chercheurs et intervenants clés issus d’organismes gouvernementaux, de l’industrie et de communautés autochtones dans le but commun de renforcer la capacité du Canada à s’adapter à la fonte du pergélisol à grande échelle. Les chercheurs du réseau s’attacheront à comprendre la fonte du pergélisol et ses conséquences, à établir des prévisions, à coupler les données des stations de terrain aux prévisions nationales et à élaborer des prototypes de produits experts et de pratiques de concert avec les intervenants. En faisant appel aux partenaires autochtones, le réseau tiendra compte du savoir ancestral, qui viendra compléter et enrichir la recherche et les relations du réseau. PermafrostNet CRSNG répondra aux besoins en recherche fondamentale et en innovation et s’appuiera sur les priorités des intervenants. Les résultats du réseau comprendront des produits d’information à l’intention des intervenants, des rapports de synthèse sur les changements subis par le pergélisol au Canada et les pratiques envisagées pour faire face à la fonte du pergélisol. Ce changement transformateur se produira grâce à une meilleure compréhension de la fonte et du risque connexe, à des méthodes inédites d’observation et de prédiction de la fonte du pergélisol, à l’acquisition, par les spécialistes, de nouvelles compétences et expériences et à la transformation de la communauté canadienne du pergélisol.

PermafrostNet CRSNG offre une masse critique, une expertise diversifiée et une communication qui ne sont accessibles à aucun groupe de recherche ou organisme gouvernemental travaillant seul. Le réseau, qui appuie le travail de 15 professeurs rattachés à 11 universités, compte 31 collaborateurs et plus de 40 organismes partenaires à l’échelle nationale et internationale. En outre, il a pour ambition de former 60 personnes hautement qualifiées ̶ doctorants, étudiants à la maîtrise, stagiaires postdoctoraux et assistants à la recherche nordique. Les intervenants sont entre autres les gouvernements fédéral, provinciaux et autochtones mais aussi des collectivités nordiques, des entreprises d’exploitation des ressources et de construction, des scientifiques qui étudient les phénomènes touchés par le pergélisol et des organisations internationales comme le Groupe d’experts environnemental sur l’évolution du climat (GIEC).

PermafrostNet CRSNG est financé par les partenaires et les établissements participants en plus de bénéficier d’une subvention de partenariat stratégique pour les réseaux (à hauteur de 5,5 M$ CA) du Conseil de recherches en sciences humaines et en génie (CRSNG).

Propre aux climats froids, le pergélisol désigne un sol dont la température se maintient au-dessous de 0 °C pendant plus de deux années consécutives. Sa profondeur atteint généralement plusieurs dizaines ou centaines de mètres. Le pergélisol est gelé depuis des siècles ou des millénaires. Au cours de la fonte, le pergélisol change radicalement, comme on le comprend d’emblée en voyant la différence entre le sol gelé comme du béton et la boue molle et humide ou liquéfiée. Les interactions complexes et à long terme entre le climat, la géologie et l’écologie déterminent la température du sol et la teneur en glace, ce qui rend les prévisions difficiles. Contrairement à la neige ou à la végétation, il n’est pas facile d’observer le pergélisol à partir de satellites ou d’aéronefs, puisqu’il est dissimulé sous la couche active, couche supérieure du sol qui dégèle chaque été.

Le changement climatique provoque la fonte du pergélisol en raison d’une augmentation de la température atmosphérique et de modifications du régime des précipitations. La température de l’air au Canada, au nord du 60e parallèle, s’est accrue de 2,2 ºC entre 1948 et 2013 (trois fois la moyenne mondiale) et les précipitations ont également augmenté. De mémoire d’homme ou depuis le début de la dernière glaciation il y a environ 120 000 ans, les tendances et les conditions dans le Nord canadien sont sans précédent. La fonte du pergélisol ̶ dégel graduel de la glace souterraine ̶ provoque des changements importants dans le comportement du sol, comme la perte de solidité, et peut perturber les systèmes naturels et le cadre bâti. La fonte peut entraîner des affaissements en terrain plat, mais aussi des glissements de terrain sur les pentes. Le changement climatique et les perturbations provoquées par le développement ou les feux de forêt interagissent et amplifient souvent leurs effets mutuels sur l’état du pergélisol. La fonte du pergélisol, imputable à la chaleur latente élevée de la fusion de la glace, est bien plus lente que le réchauffement du sol sans glace. Dès lors, les conséquences de la perte graduelle de glace souterraine persisteront pendant des décennies, voire des siècles, à de nombreux endroits. La fonte généralisée du pergélisol entraîne également la libération de gaz à effet de serre provenant du carbone actuellement piégé dans le sol gelé, intensifiant encore davantage le réchauffement climatique.

De nombreux organismes canadiens ont pour mandat de générer, de mobiliser ou d’utiliser les connaissances sur le pergélisol. Mentionnons entre autres les commissions géologiques territoriales et la Commission géologique du Canada (CGC), Transports Canada et les ministères territoriaux du Transport, Environnement et Changement climatique Canada (ECCC), le Centre canadien de cartographie et d’observation de la Terre (CCCOT), Savoir polaire Canada, les instituts et collèges de recherche nordique, les organisations autochtones, les offices des terres et des eaux ainsi qu’un large éventail d’industries et de sociétés. Le pergélisol, sur lequel les données sont par nature rares mais évoluent aussi rapidement, requiert une recherche coordonnée et un partenariat à l’échelle du pays pour générer des connaissances pertinentes et les transposer en mesures efficaces. En mettant l’accent sur l’intégration des données, la synthèse et les prévisions, PermafrostNet CRSNG regroupera les connaissances, intensifiera les efforts à l’échelle du pays et élaborera les méthodes et techniques novatrices pour le traitement de données et les prévisions dont les Canadiens ont besoin.

La politique étrangère du Canada pour l’Arctique commence par l’énoncé suivant : « L’Arctique est essentiel à l’identité nationale canadienne ». Quand un principe fondamental de ce genre est largement ébranlé, alors il devient prioritaire de comprendre le changement qui s’est produit. PermafrostNet CRSNG est stratégique du fait qu’il orientera la politique, façonnera les pratiques et se concentrera sur la recherche ayant trait à un nouveau défi de plus en plus grand. Il s’agit d’une priorité urgente et stratégique pour le Canada, car la fonte du pergélisol est un nouveau défi qui aura une profonde incidence sur la masse continentale du pays. À l’heure actuelle, le Canada n’y est pas préparé.

Il faut de toute urgence mener une recherche coordonnée sur la fonte du pergélisol au Canada afin d’atténuer une crise déjà clairement visible. Cette crise devrait s’intensifier et perdurer dans le Nord canadien tout au long du XXIe siècle. En mettant l’accent sur l’intégration des données et les projets pilotes utilisant l’apprentissage machine, PermafrostNet CRSNG ouvre la voie à une utilisation éclairée de l’intelligence artificielle et de l’analyse des mégadonnées en tant que technologies émergentes à l’appui de l’adaptation au changement climatique dans le Nord canadien. Enfin, comme le réseau met beaucoup l’accent sur le Nord et accorde une grande attention à la participation des Autochtones, il franchit une étape stratégique vers l’établissement d’une base de recherche diversifiée et concurrentielle. Le Canada possède de vastes gisements minéraux, des réserves de pétrole et de gaz et des ressources renouvelables provenant de la foresterie, des populations animales et des pêches. Une grande proportion de ces ressources se trouvent dans l’Arctique, où le pergélisol et sa fonte nuisent à la conception, à la construction et à l’entretien de l’infrastructure ainsi qu’à la mise en valeur des terres et à la gestion des déchets.

Les répercussions observées et prévues de la fonte du pergélisol sont profondes et persisteront pendant des décennies. Elles se font sentir à l’échelle du paysage en raison du changement climatique et à l’échelle locale en raison des perturbations causées par l’activité humaine, l’infrastructure ou la faune. À mesure que la fonte du pergélisol modifie la surface émergée et les systèmes hydrologiques, elle peut également transformer l’emplacement et la nature des effets cumulatifs de l’activité humaine. Les solutions efficaces pour une exploitation économiquement concurrentielle des ressources de l’Arctique doivent être bien documentées et tournées vers l’avenir et reposer sur des données et des prévisions fiables. Nous devons disposer de connaissances sur le pergélisol et de produits connexes, comme les prévisions de l’état futur du pergélisol pour réduire le plus possible le risque pour les écosystèmes et l’infrastructure à long terme. Par ailleurs, la surveillance systématique, scientifique et communautaire du pergélisol dans le cadre bâti pour mettre en évidence l’évolution des données de référence écologiques est indispensable à la prise de décisions fondées sur des données probantes dans un Arctique en pleine mutation.

PermafrostNet CRSNG fait fond sur les initiatives antérieures comportant des volets concernant le pergélisol et regroupe et couple leurs résultats. Mentionnons notamment les initiatives financées par le CRSNG, Arctique en développement et pergélisol en transition (ADAPT), le Changing Cold Regions Network (CCRN) et le Canadian Network for Regional Climate and Weather Processes (CNRCWP).

L’environnement de recherche collaborative dans ce réseau de partenariat repose sur six principes:

  1. Notre culture de recherche est respectueuse, inclusive et ouverte aux enseignements tirés des méthodes de recherche autochtones.
  2. Les activités du réseau appuient les relations et les participants au réseau s’épaulent pour atteindre des objectifs communs.
  3. Nous recherchons le savoir ancestral et les connaissances nordiques, nous les regroupons et nous contribuons au renforcement des capacités dans le Nord.
  4. Nous optons pour la publication ouverte des résultats de la recherche, des codes informatiques et des données et nous privilégions un dialogue ouvert sur la paternité et la reconnaissance des contributions.
  5. Nous écoutons les commentaires du PHQ et appuyons les initiatives qu’il mène.
  6. Nous nous engageons à limiter les émissions de carbone, en reconnaissant la nécessité concurrente d’atténuer le changement climatique et de faire des recherches sur les possibilités d’adaptation.

Ces principes guident la gestion du réseau et les participants. La structure de gouvernance et de gestion vise à maintenir le cap du réseau au fil de son évolution et à faire en sorte qu’il demeure mobilisé, pertinent et souple et qu’il rende des comptes. L’objectif primordial est de permettre d’établir des liens et des relations entre les chercheurs et les partenaires et de les renforcer en raison de leur importance cruciale pour le succès du réseau tout en constituant l’un de ses principaux résultats.

De nombreux organismes partenaires comptent des membres qui seront également des collaborateurs du réseau. La gestion, l’orientation et la responsabilité fiduciaire incombent globalement au conseil d’administration de PermafrostNet CRSNG, qui fait appel à un comité scientifique pour assurer le leadership scientifique nécessaire à la gestion et à l’exécution du programme de recherche et à la surveillance de la production des résultats du réseau. Quant à l’orientation stratégique du réseau, elle est appuyée par des comités pour ce qui concerne la communication et la mobilisation des connaissances de même que l’équité, la diversité et l’inclusion. Une directrice des opérations à temps plein fournit une orientation pour l’ensemble des activités et veille à la bonne communication, au contrôle et à la reddition de comptes sur une base quotidienne. Chaque thème de recherche est dirigé par deux universitaires expérimentés.